Quand dans une discussion ou en réunion il est proposé de relancer le transport fluvial sur certains secteurs du réseau fluvial où toute activité commerciale a disparu, on s’entend répondre fréquemment: c’est un rêve !
Vu de l’intérieur, au plus près du terrain, il apparaît que ce mot est particulièrement mal venu. Plus particulièrement encore au regard d’un secteur d’activité qui nécessite un professionnalisme confirmé, et à propos de personnes convaincues de l’intérêt économique et sociétal des voies navigables, aujourd’hui désertées par les bateaux de transport de marchandises.
Rappelons qu’en 1970 il n’y avait plus aucun tramway en France, et pourtant aujourd’hui le voilà de retour dans la plupart des grandes métropoles. Leur « disparition » provisoire a été suivie d’une renaissance remarquable : le concept n’avait pas perdu de sa validité ni de sa crédibilité dans notre société actuelle.
Si on entend parler de rêve, peut-être faudrait-il analyser les raisons pour lesquelles nous voyons tant de bateaux abandonnés, coulés ou mal entretenus le long des berges des canaux français. C’est sans doute parce que, quand passe un bateau chargé glissant sur l’eau, entouré de fumerolles au petit matin, entre deux lignes d’arbre aux feuilles roussies par l’automne, le désir de posséder un bateau envahit le passant qui rêve de plonger dans ce magnifique tableau pour partir, lui aussi, au bout du monde…
Vient ensuite la découverte de la réalité, le rêve n’est plus que routine, puis une charge bientôt négligée pour être revendue, voir abandonnée.
Plutôt que de vendre du rêve aux apprentis capitaines et aux assoiffés de liberté de pacotille, mieux vaudrait encourager la relance d’une activité confirmée par des millénaires de pratique, conformes aux préoccupations environnementales du 21ème siècle et aux aspirations de toute une population désireuse de voir revivre ses canaux.